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  • Photo du rédacteurJean-Baptiste Chauvin

Impro: Et si on faisait du cinéma !


Lorsqu'on parle d'improvisation théâtrale, on parle bien d'un art qui utilise les codes du théâtre. Nous jouons sur une scène, face à un public, avec toutes les contraintes techniques que peut avoir un comédien de théâtre. Je dois porter ma voix, orienter mon jeu, me mettre en lumière... Le spectateur est face à la scène et promène son regard comme bon lui semble. Il a une vision globale et tous les spectateurs voient ce même ensemble même si ils peuvent choisir individuellement de regarder de tel ou tel coté.

L'acteur d'improvisation ressemble donc beaucoup à l'acteur de théâtre.

Mais en tant qu'improvisateurs nous sommes aussi auteurs et metteurs en scène. Et là qu'est ce qui change ?

L'auteur de théâtre a un cadre à respecter si il veut que sa pièce soit jouée. Il doit limiter le nombre de personnages, et le nombre de scènes. Il doit aussi limiter le nombre de lieux dans lesquels vont évoluer les personnages. De fait les pièces de théâtre sont souvent découpées en scènes et en actes, qui correspondent à des unités de lieu et des unités de temps (même si des ellipses sont possibles). De la même manière, le metteur en scène, et avec lui le ou la scénographe, le costumier ou la costumière doivent tenir compte du cadre imposé par l'auteur tout en respectant des contraintes techniques, budgétaires, matérielles... En matière de production, le théâtre est finalement un art assez lourd.

Mais que dire alors du cinéma. Pour le coup, c'est carrément une industrie. Mais le cinéma a une autre forme d'écriture, notamment grâce au montage. On l'oublie souvent mais l'écriture au cinéma c'est tout autant le scénario que le montage. Pourquoi ? Parce que c'est ce qui va capter le spectateur et l'emmener. Et là, le réalisateur a plus de libertés car il peut s'amuser avec les lieux et le temps. Il peut passer alternativement d'un décor à un autre, faire des sauts dans le temps, suivre des personnages qui ne sont pas au même endroit... Les contraintes techniques sont bien sûres très importantes au cinéma, mais l'écriture offre d'autres possibilités que le théâtre.

Mais quel rapport peut avoir l'improvisateur avec le cinéma ? Ayant posé pour règle la spontanéité, il y a un accord avec le spectateur qui est que tout est suggéré: pas de décor, pas de costumes. Bon, cela ne se vérifie pas toujours et certains spectacles d'improvisation s'imposent un lieu et des costumes, mais même dans un schéma très normé comme le match d'impro, la convention première est que l'improvisateur peut être qui il veut, où il veut, pour peu que le spectateur le suive.

Cela ouvre donc des perspectives toutes autres que celles du théâtre, car du coup je ne suis pas cadré par des scènes et des actes, et je peux me permettre de changer de décor, de personnages, de faire des sauts dans le temps, de faire des balances... Je peux même zoomer, élargir, faire des plans séquence, suivre une route, me perdre dans un parcours...

L'écriture en improvisation ressemble donc assez à l'écriture cinématographique, alors que nous nous produisons sur une scène de théâtre. Pour nous tout est possible, sans moyens ou presque, sachant que tout repose sur la suggestion. C'est une grande liberté mais qui ne doit pas nous faire oublier que tout repose sur notre capacité à imaginer et à emmener le spectateur dans cet imaginaire.

Mais ça, ce n'est pas un secret: l'art de l'improvisation repose sur l'imaginaire, et nous devons nourrir sans cesse cet imaginaire pour élargir le champ des possibles. On peut le nourrir de lectures, d'expériences, de théâtre mais aussi et surtout de cinéma.

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