top of page
  • Photo du rédacteurJean Baptiste Chauvin

L'improvisation, ça ne s'improvise pas?


L'improvisation ça ne s'improvise pas

Tout improvisateur a déjà entendu, ou dit cette petite formule lapidaire. L’improvisation, ça s’improvise pas. Encore une manière de dire : Houlala, y’a du boulot derrière ! C’est pas donné à tout le monde ! Faut être un spécialiste.

C’est pas faux. Faut être un spécialiste, mais pas en improvisation. Faut être un spécialiste en théâtre improvisé. Ha oui, et pourquoi on parle tout le temps d’improvisation théâtrale alors ? Et bien pour moi c’est un abus de langage. Parce que l’improvisation, ce n’est pas une qualité, c’est dans la nature humaine. J’irais même plus loin, c’est dans la nature animale. C’est cette capacité à agir de façon spontanée, instinctive, dans l’instant. Nous produisons chaque jour des milliers de gestes, d’actions spontanées, improvisées. Comme les animaux. Je prends un verre quand j’ai soif, je ris quand je vois quelque chose de drôle, je me pousse pour laisser passer la voiture, ou je saute sur la gazelle si je suis un lion. J’improvise sans arrêt.

Ho mais on n’est pas des bêtes, quand même. Non, car nous avons un petit truc en plus qui s’appelle la conscience, qui nous permet de réfléchir et de faire de chacune de nos expériences un acquis. (Bon il paraît que certains animaux ont une conscience mais là je rentrerais pas dans le débat). Mais cette conscience, est-ce qu’elle nous sert en impro ? Heu oui, mais pas toujours. Notre conscience, c’est elle qui nous empêche parfois d’être en connexion avec l’instant présent. Il faudrait être inconscient alors ? Non, quoique. L’inconscience peut avoir du bon, non pas dans son sens premier de la perte de conscience (comas, hypnose, délire…) mais dans son sens second qui est celui de l’impulsion, du geste spontané, non réfléchi. De qui dit-on qu’ils sont inconscients ? Les enfants, les fous, ceux qui prennent des risques inconsidérés. Ne faisons-nous pas un peu partie de ceux là, nous improvisateurs ?

Donc cette phrase est pour moi un peu stupide. Et comme beaucoup de choses stupides, on aime à les répéter. Ce qui fait de l'improvisateur quelqu’un d’un peu particulier, c’est que cette spontanéïté, cette inconscience, cette prise de risque, il a décidé d’en faire un moteur créatif, que de surcroit il va mettre en spectacle. Et ça, oui, ça se travaille. Par la confiance, par le lâcher prise, mais bien sûr aussi par l’apprentissage théâtral, la connaissance de la dramaturgie.

Des improvisateurs, nous le sommes tous. Des joueurs d’impro, non. Encore une fois, ce qui différencie l'improvisateur, c’est qu'il est un joueur, et qu'il fait de l’instant un jeu.

499 vues
bottom of page